SF ou fantastique ?

SF ou fantastique ?
SF ou fantastique ?

Saison Fantasy à la BNF : Construire des mondes - World building (23 janvier 2020)

C'est la deuxième conférence de la saison Fantasy à la BNF (exposition sur Tolkien, site Fantasy, etc).


Cette fois, on écoute :
  • Erwan Le Breton, membre de l’équipe Editorial Creative Services d’Ubisoft et ancien directeur artistique de la licence Might & Magic.
  • Laurent Di Filippo, maître de conférences, centre de recherche sur les médiations, Université de Lorraine, spécialisé dans les textes scandinaves et le transmedia.
Nos deux intervenants nous expliquent leurs critères pour juger de la qualité et de la richesse d'un monde construit. Erwan Le Breton nous parle des jeux vidéo bien sûr, mais c'est valable pour la construction de n'importe quelle oeuvre de fiction, roman, nouvelle, série TV, film, BD, etc.

En général, on commence ses premières créations en partant d'un monde existant : on peut lui donner une teinte différente, se le réapproprier, comme beaucoup l'ont fait avec Tolkien (et avec Harry Potter, etc). C'est un peu de la fanfiction.

Puis, on se lance dans l'aventure : on crée un monde propre à notre marque (en l'occurrence, celle d'Erwan Le Breton : la licence Might & Magic  d’Ubisoft).


C'est, comme le plus souvent, de la fantasy médiéviste, ou medieval fantasy, ou heroic fantasy : un univers imaginaire qui s'inspire d'un Moyen-Âge occidental fantasmé.

Donc, pour construire un monde selon Ubisoft, il faut :


  • World : une planète, une terre
  • Systems : la météo, la gravité, les systèmes humains, les éco-systèmes, etc. Ils vont créer des mécaniques à l'intérieur du jeu, qu'il faudra respecter.
  • Gameplays : l'articulation entre le "game", les structures et règles de jeu, et le "play", la façon dont le joueur s'approprie les possibilités du jeu en mettant au point ses propres stratégies, pour répondre aux contraintes que les règles du jeu lui imposent.
  • Personnages : ils représentent le monde, ses valeurs, ses systèmes ; ils vont créer des opportunités d'histoires, de situations.
  • Stories : les histoires, situations, scénarios possibles dans le jeu, que les joueurs vont créer.

Ne pas oublier que le monde créé est plus grand que le jeu : en jouant, on ne verra pas l'intégralité de l'univers créé. J'ai beaucoup de mal avec ce concept. Pourquoi créer des détails dans le monde si les joueurs ne peuvent pas les voir et en profiter ? C'est dommage.

Une oeuvre doit être particulière, tout en s'insérant dans un monde et en l'enrichissant : c'est la définition du transmedia. Cela permet différentes déclinaisons possibles en version comique, enfantine, etc. Mais surtout, on ne doit pas contredire le monde d'origine, même si on peut lui ajouter des choses.

Il y a deux manières de commencer à créer un nouveau monde :

 

  • exploring world : comme dans Le Seigneur des Anneaux, le monde est intégralement créé lorsqu'on commence à se lancer dans le jeu (Tolkien pouvait se le permettre, mais pas les créateurs de jeux vidéos actuels).
  • expanding world : chaque nouvelle étape apporte une nouveauté à la mythologie déjà existante.

Ce monde créé doit posséder certaines qualités :


  • APPEALING : ATTRACTIF
- des opportunités d'histoires, des invitations pour découvrir le monde créé

  

- une narration ouverte, à la carte


- l'appel de l'aventure / on ne sait pas ce qui va se passer / conserver une part de mystère

- le monde est vivant et actif, il bouge et évolue


- le monde est identifiable par des "signatures", des choses uniques qui sont les marques de l'univers


- et enfin, les petits détails qui comptent...
  • BELIEVABLE : CRÉDIBLE
- faire des recherches pour le monde créé, dans les livres et sur place, quand ça s'inspire d'un monde réel, ancien ou actuel. Pour cela, mettre en place un outil de travail collaboratif accessible à tous, qui contient toutes les données à connaître sur tel sujet, tel lieu, telle période historique.
Dans le cas d'Ubisoft, l'outil s'appelle WTF - World Texture Facility (ils se sont fait plaisir avec l'acronyme...)


- les références historiques sont filtrées par une vision créative


- les influences sont nombreuses, fouillées, riches : populaires, historiques, classiques... "Pour faire du Lovecraft, ne lisez pas seulement Lovecraft, lisez ce que Lovecraft lisait" : il faut travailler sur les sources, à chaque fois.

 

- faire un monde proche du monde qu'on connaît (là, je suis moyennement d'accord), nuancer son univers, ne pas juger, mais assumer les conséquences.


  • CONSISTENT : COHÉRENT, LOGIQUE
- tous les systèmes du monde créé doivent suivre une logique interne : systèmes physiques, naturels, urbains, économiques, politiques, sociétaux, scientifiques, technologiques, artistiques, culturels, moraux, religieux.

Il existe beaucoup d'outils internes pour créer un monde cohérent en évolution.

  

Il y a toute une équipe pour cela, mais avec un garant du monde qui prend la décision finale et harmonise les apports de chacun. Le directeur créatif est comparable au réalisateur de cinéma : il décide et organise le contenu et la vision du jeu, il travaille avec le chef de projet (planning, budget) et avec les autres directeurs (artistiques, etc).

 

Le monde doit réagir de façon logique, suivant sa logique interne, aux actions du joueur : sinon on parle de dissonance ludo-narrative (conflit entre le récit d' un jeu vidéo raconté à travers l'histoire et le récit raconté à travers le gameplay).


Et le mot d'ordre de la fin est :

"Créez avant tout les mondes que vous aimez !" 😄



Conférence à revoir ici (à partir de 24.10).



Création : 23/01/2020

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