SF ou fantastique ?

SF ou fantastique ?
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Newimages Festival 2023 (FDI)

Il y a un site, un programme, et un autre programme.

Bienvenue au Forum des images !
Les thèmes qui traversent cette sélection sont divers, mais se recoupent dans leur actualité brûlante : l’écologie avec Bulle, la santé mentale avec Manic VR ou encore l’éducation sexuelle avec l’œuvre didactique Clit-moi.


 


His name is my name

Un témoignage émouvant d'une jeune femme qui sait qu'un de ses ascendants, celui qui lui a transmis son nom, était un nazi convaincu qui a aidé son régime.
Elle porte le poids de cet héritage, d'autant plus fort que cet homme est non seulement son ancêtre, mais aussi celui de ses ancêtres qui lui a transmis son nom de famille.

Jusqu'à quel point peut-on se sentir responsable des fautes de sa famille ? Rationnellement, il est idiot de dire qu'on porte le poids de cette culpabilité, puisqu'on y est littéralement pour rien. Mais c'est sans compter avec l'élément psychologique : on a beau faire, on se sent toujours coupable. Et il y a le poids de la société. Certains ne se gênent pas pour juger (juger quoi ? la personne n'était même pas née), et même s'il n'y a aucun jugement, on invente ce jugement, on projette le jugement que l'on s'inflige soi-même. C'est très dur.

Pour le côté "Newimages" par contre, je ne vois pas bien ce que cette nouvelle forme artistique apporte réellement à l'histoire racontée. C'était une série de films d'animation, avec une immersion très limitée. Bon en plus, c'était en anglais, alors je n'ai pas tout compris...
Bref, la thématique était beaucoup mieux que la forme artistique.



Wonder of life

C'est mignon. Plus que mignon ? Je ne sais pas. On est à hauteur d'animal, on est un animal dans un étang, c'est joli la nature, la vie, la végétation et les bestioles. Le mouvement.

"Qu'est-ce que la vie ?
Ce sont les nervures d'une feuille de lotus.
C'est le va-et-vient d'une libellule.
C'est un léger parfum qui se dissipe dans l'air.
Ce sont les ondulations qui disparaissent dans l'eau...
Dans l'étang de lotus à l'aube."


Plastisapiens


Un film proposé par l'Office National du Film du Canada.

"Une expérience de réalité virtuelle surréaliste qui nous projette dans un univers où les corps et le plastique ne font plus qu’un. Prenant appui sur la science, le récit bifurque vers une fable écofuturiste d’une beauté étrange et ironique, un voyage à travers le temps et l’évolution, vers un avenir imaginé de toutes pièces. Alors que nous interagissons avec les organismes autour de nous, puis que nous assistons à la fusion du plastique et de notre être virtuel et organique, l’expérience met en place une bulle de bienveillance. Doucement guidés à travers un univers stupéfiant de corps hybrides, nous sommes amenés à nous demander comment la relation de réciprocité entre les humains et l’environnement transforme notre identité, jusqu’au cœur de notre ADN. Nous remontons le temps afin d’assister à la naissance de la vie organique et de la vie plastique ; nous découvrons le lien de parenté qui unit l’une et l’autre aux bactéries, aux virus et aux champignons ; symboles d’un futur imaginaire dans lequel la peau et les matières synthétiques ont évolué conjointement, et où la survie du plus fort tient à l’acceptation d’une flexibilité du corps et de l’esprit. Notre attitude devient alors plus propice à la conversation réfléchie et aux mesures concrètes relatives à cette question mondiale pressante de la pollution qu’entraînent les industries pétrochimiques. Incarner ce rapport de réciprocité entre la substance plastique et la substance organique. Un morceau de bioplastique comestible, avant-goût des thèmes de la porosité et des corps hybrides."

Vu le pitch (mélanger l'organique et le plastique), je me suis demandé à quoi ça correspondait, vers quoi ça se dirigeait, sur quoi ça s'appuyait. Et bien en fait, le plastique vient de l'organique. Le plastique n'existe pas dans la nature, on le fabrique à partir de l'organique. C'est simplement le résultat, les résultats, de multiples façons de traiter l'organique, surtout le pétrole.

La définition du CNRTL : "huile minérale naturelle combustible, formée d'hydrocarbures. Le pétrole proviendrait de la décomposition, à l'abri de l'air, et en présence d'eau, d'organismes animaux".

IFPEN : "Le pétrole résulte de la dégradation thermique de matières organiques contenues dans certaines roches : les roches-mères".   

Le pétrole résulte de la dégradation thermique de matières organiques contenues dans certaines roches : les roches-mères. Ce sont des restes fossilisés de végétaux aquatiques ou terrestres, de bactéries et d'animaux microscopiques s’accumulant au fond des océans, des lacs ou dans les deltas. Appelés "kérogène", ces résidus organiques sont préservés dans des environnements où les eaux sont dépourvues d'oxygène, se mêlant ainsi aux sédiments minéraux pour former la roche-mère.

Pendant des dizaines de millions d’années, de nouveaux sédiments vont continuer à s'accumuler, entraînant la roche-mère à de grandes profondeurs. Généralement entre 2 500 et 5 000 m et sous l’action des hautes températures qui y règnent, le kérogène se transforme (craquage thermique) en pétrole liquide accompagné de gaz. À plus de 5 000 m, le pétrole "craque" à son tour et se transforme en gaz.
La roche-mère est une roche argileuse présentant un aspect feuilleté d'où la dénomination huile et gaz de schiste.

Et la biochimie ? Y a-t-il une chimie entièrement biologique, sans intervention humaine ?

Est-ce qu'on aura vraiment un jour cette fusion de l'organique et du plastique ? Malgré ce que dit ce film, il vaudrait quand même mieux éviter ce cas de figure... Les éléments plastiques, avec leur chimie bousculée, ne font pas du bien à l'environnement. Quant à l'ADN humain, il vaut mieux aussi qu'il évolue naturellement.


Clit moi 


Décidément, l'ONF fait des trucs sympas !
C'est toujours très chouette et instructif ! Sérieux, on a vraiment l'impression d'être en train de se masturber, ou de masturber son téléphone, et ça marche, et on comprend mieux, et on est contente ! A mettre entre toutes les mains, notamment les mains masculines.


Manic VR

"Un documentaire expérimental en réalité virtuelle qui plonge le participant dans les mondes exubérants et chaotiques d'une imagination hantée par le trouble bipolaire."

C'est vraiment ça, le trouble bipolaire ? C'est curieux. Je pensais que c'était plutôt l'alternance excitation-dépression, avec ces deux pôles bien marqués. Ce ne sont pas des hallucinations visuelles, une telle perte de contact avec la réalité.
Je ne sais pas.


Vaysha l'aveugle

Le concept était intéressant et ô combien symbolique. Ne jamais voir le présent, mais voir en même temps, d'un œil le passé, et de l'autre le futur.
Par contre visuellement, les deux yeux en même temps, ça ne fonctionne pas, on ne comprend rien à ce qu'on voit. Donc on ferme tantôt un œil, tantôt l'autre, et là c'est bon, c'est même plutôt bien fait. Et on se rend compte de ce que vit Vaysha : elle ne sait pas ce qui se passe dans son environnement, elle est aveugle à son propre présent. Tout ce qu'elle voit, c'est tantôt la naissance, tantôt la ruine. C'est vrai que c'est un thème assez fort : il faut être capable de voir son propre présent, sa réalité, pour pouvoir vivre.
Pour ce concept, la réalité virtuelle est tout à fait indiquée, voire indispensable vu que chaque œil voit une chose différente ! Bravo aux concepteurs.


Dream (Rêve)

Rêve est un générateur d’expériences en ligne inspiré des mécanismes uniques des rêves.
Joli, mais... tellement soporifique. En plus, on est allongé. Bref, j'ai failli m'endormir, et le personnel d'accueil m'a dit que je n'étais pas la seule.


Création : 09/04/2023

Newimages Festival 2022 (FDI)

Retour au Forum des Images pour une nouvelle édition du Newimages Festival ! 2022 cette fois.
 

 
   


On the Morning you Wake

"Un jour de janvier 2018, tandis que les habitant·es d'Hawaï vaquent tranquillement à leurs occupations, un SMS alarmant est envoyé à l'ensemble de la population. "UN MISSILE BALISTIQUE A ÉTÉ LANCÉ À DESTINATION DE HAWAÏ. METTEZ-VOUS IMMÉDIATEMENT À L'ABRI. CECI N'EST PAS UN EXERCICE." Alors que tous les réseaux mobiles s'effondrent et que la panique s'installe, les quelque 1,4 millions d'habitant·es et, à travers eux/elles, leurs proches et ami·es de par le monde, prennent conscience de la permanence de la menace nucléaire."

Ce film est effrayant parce qu'on est dedans, mais surtout parce que c'est arrivé pour de vrai, et que ça pourrait arriver encore. Tout le monde dit que le nucléaire est sûr et qu'il suffit de le contrôler pour qu'aucun accident n'arrive ; mais la réalité c'est que le contrôle absolu est impossible, il peut y avoir des erreurs, notamment des erreurs humaines, et personne ne sera jamais totalement en sécurité.

Quant à l'arme nucléaire... Comment peut-on avoir inventé une arme pareille, et pire l'avoir utilisée, et pire l'avoir conservée ? Je ne comprends pas.

Ce film méritait plus que de l'animation, qui introduit plus de distance avec le spectateur.


L'Arbre-Soleil, The Tree of Light


"Dans des temps immémoriaux, une divinité du soleil a placé un fragment de son cœur dans un arbre de la forêt d'Onyo. Ainsi naquit l'Arbre-Soleil, qui sortit le monde de l'obscurité et permit à la vie de se développer. Mais cette énergie n'est pas éternelle. Tous les cent ans, les vivants se rassemblent lors d'un rituel sacré pour lui restituer cette énergie. Vous allez prendre place dans ce rituel, guidé·e par une biche chamane, et participer à la renaissance de cet arbre légendaire."

On se met en cercle, on installe son matériel audio-vidéo, et on se laisse guider. 
L'effet est assez incroyable parce que le son est en 3D, et son effet est soigneusement calculé dans l'espace, dans le temps, et en raccord avec l'image.
On est d'abord dans le noir, un noir absolu. Et une voix, des voix surgissent, juste derrière notre oreille, ou à 2 mètres de nous, c'est absolument extraordinaire. On a vraiment l'impression de pouvoir évaluer la distance qui nous sépare de chaque interlocuteur. Je ne savais pas que cette technologie était aussi avancée. Bravo.

Donc on participe à ce rituel mythologique qui fait intervenir les êtres vivants, les différents habitants de la nature, pour réveiller la lumière du Soleil qui permet à chacun de rester en vie.

C'était apaisant, réconfortant, chaleureux, j'ai bien aimé. Une jolie histoire, pleine de sens, mais qui va sans doute s'oublier trop vite. Dommage.


Rétrospective François Vautier : Un homme, une vision

"À travers sa trilogie en réalité virtuelle (I Saw the Future, Odyssey 1.4.9, Recoding Entropia) inspirée par l’œuvre d'Arthur C. Clarke, le réalisateur François Vautier explore l’absolu et le devenir humain. Ces œuvres prolongent l’espace et le temps pour esquisser les traits d’une intelligence invisible."

- I Saw the Future

"En 1964, le visionnaire Arthur C. Clarke dévoile sa vision du futur devant les caméras de la BBC. Revisitant le signal transmis par ces premières images, « I Saw the Future » nous plonge littéralement à l’intérieur de la matrice sonore et visuelle constituant le cœur de cette archive. Ce film permet aux spectateurs de s'immerger dans un espace en 3D faisant écho aux prédictions futuristes d'un savant humaniste visionnaire."

- Odyssey 1.4.9.

"Odyssey 1.4.9 est une exploration en VR dans la matrice du chef-d'œuvre de Stanley Kubrick "2001, L'Odyssée de l'espace". Au-delà d’un hommage personnel, ce film est une immersion sensorielle au cœur du film de Kubrick, mettant en scène le fameux monolithe sombre en l’édifiant comme un incroyable objet à défilement d’images. Un véritable aide-mémoire qui va cristalliser l’évidente thématique du film : l’intelligence absolue."

- Recording Entropie

"Au cœur du néant, à l’horizon d’un espace infini et d’un temps insondable, erre une imposante géométrie. Un tétraèdre immense qui bientôt va se disloquer pour s’éparpiller et délivrer par son changement de forme un mystérieux message."

Les 3 œuvres se confondent dans mes souvenirs, ce qui ne m'étonne guère.
La thématique est commune, le mystère et l'incompréhension aussi. C'est l'intelligence, humaine, artificielle ou extraterrestre, c'est l'avenir humain et technologique, c'est un vertige visionnaire. C'est le film de Kubrick, en plus beau, plus vertigineux, plus incompréhensible encore. Il n'y a plus de limites dans ces expectatives.


The Shaman Light

"The Shaman Light consiste en un voyage au travers du rite shamanique de « La Limpia », une formidable cérémonie dans la jungle amazonienne. Inspirée par ce rituel, « The Shaman Light » est une œuvre fictive en réalité virtuelle 3D dans laquelle un utilisateur peut expérimenter un rituel dans une grotte magique et voyager dans un canoé avec un esprit shamanique."
Le créateur de ce film a travaillé avec un shaman pour reproduire ses visions dans un film. On peut ainsi profiter de l'expérience chamanique sans avoir à participer au rituel ni à consommer les drogues qui provoquent ces visions.
Le résultat est beau et fascinant, mais il reste quand même assez effrayant quelque part. Cette impression de ne rien contrôler, de ne pas pouvoir en sortir. J'avoue que j'étais un peu inquiète de ce qu'on allait bien pouvoir me montrer.
Finalement ça s'est bien terminé, même si on est avalé par un gros serpent...



Je ne l'ai pas vu, mais finalement j'aurais bien voulu.



Création : 11/06/2022

Aux frontières de l'humain, exposition

Une exposition proposée par le Musée de l'Homme.





Cette exposition explore les frontières de l'humain pour tenter d'en proposer une définition, des propositions de définitions, des contours de ce qu'est un être humain, par rapport notamment à ses capacités. Ici, les questions sont plus nombreuses que les réponses.

On le compare donc à d'autres choses qui d'une façon ou d'une autre lui ressemblent, afin d'en dessiner les contours.
Et on le compare principalement aux autres animaux, et aux objets et dispositifs artificiels qui augmentent ses capacités.

Cette perspective aboutit logiquement à la réflexion sur le transhumanisme.






"On ne peut parler de l'être humain sans le considérer à la fois comme un être biologique, culturel, psychologique et social"
Edgar Morin, Dialogue sur la nature humaine, 2000


L'Homme, un animal ?

Biologiquement, oui.
Les animaux sont-ils différents des hommes ? Pas toujours...
Mais il est très intéressant de regarder ce que les différentes cultures, de par le monde, ont créé sur cette interaction entre l'homme animal biologique et l'homme socialement construit, différent des animaux.






Les différents points de vue philosophiques, religieux, éthiques, anthropologiques, étiologiques, se confrontent et s'opposent, en Europe et dans le monde, depuis la fin de la vision hégémonique du judéo-christianisme. 

Le statut des animaux est également concerné, ce qui accentue les dissensions. Quel(s) statut(s) donner à des souris de laboratoire sur qui on teste des médicaments, à des cafards qu'on veut éliminer à tout prix, à des loups dont on a peur, à des boeufs dont on se nourrit, à des chats qu'on cajole ? On n'est pas prêts pour ce débat.








L'homme et la technologie : pour survivre, pour vivre, ou pour repousser les limites ?

Passer des chaussures aux baskets de sport... A la recherche de la performance.



Il est reconnu que l'entrainement physique et mental d'une personne est primordial pour l'amener au plus haut de ses capacités.

Le cyborg : le transhumanisme

Depuis la prothèse pour remplacer un membre amputé jusqu'à l'implantation de matériels dans le corps pour des raisons artistiques ou réflexives : que nous apportent le métal, le plastique, l'IA, l'électronique installées à l'intérieur de notre propre corps ? Où s'arrête le besoin, où commence le désir ? Où s'arrête le corps humain, où commence la machine ?

Les artistes, les techniciens autant que les philosophes s'emparent de ces questionnements, mais ils ne vont pas assez vite (le temps de la réflexion est un temps long) par rapport aux progrès de la technologie et son emploi par des structures (armée, médecine) qui ne veulent jamais attendre.

Le corps est atteint, volontairement ou non ; le psychologique est atteint aussi, même si la personne est volontaire. Quelles conséquences sur le psychisme ? On ne fait que commencer à travailler là-dessus. Encore une fois, la technologie va trop vite ! Même si les prothèses médicales sont bien sûr une bénédiction.




Le Manifeste cyborg de Donna Haraway : le cyborg est un être sans frontières ni limites.


Un être sans frontières ni limites peut-il toujours être un être humain ? 


Le transhumanisme version médicale






Et l'art pointe le bout de son nez : la médecine tente de guérir le corps en le changeant, l'art s'occupe de guérir l'âme. 







Le corps malade, amputé, peut être en partie réparé par la médecine, mais l'intention ne s'arrête pas toujours à la seule réparation. Très vite, l'enjeu peut devenir performatif.





Et on arrive très vite au fameux exosquelette, qui fait rêver autant les médecins, les artistes plasticiens, les cinéastes que...  les armées.








D'autres tentatives partent un peu dans tous les sens, mais peuvent aussi poser des questions intéressantes.







Le corps n'est plus seulement couvert de prothèses, il est maintenant connecté. Notamment via les smartphones. C'est la connaissance du cerveau humain, des neurones, de l'IA qui est en jeu ici. Et c'est effrayant autant que fascinant. Jusqu'où irons-nous dans cette voie ? Serons-nous toujours humains à la fin ? Saurons-nous déterminer à quel moment nous cessons d'être humains ?

Heureusement que la SF se pose ces questions-là depuis déjà plusieurs décennies...





"A quel moment, à force d'échanger, de transformer, de modifier nos organes, cessera-t-on d'être humain au sens où nous l'entendons aujourd'hui pour passer à autre chose ?"
Daniela Cerqui in "Daniela Cerqui, anthropologue aux frontières du réel", RMS, 2009.

"La barrière du corps est symbolique. La franchir ouvre des questions nouvelles en termes d'identité, de dépendance, de fusion entre le vivant et la machine."
Jacques Testart, Agnès Rousseau, Au péril de l'humain, 2018



Et le libre-arbitre du cyborg ? La place de l'IA dans l'humanité du futur ? Nous dirigeons-nous vers Terminator et Robocop ? Qui domine qui, qui se sert de qui ?


Pour l'instant, l'IA pour nous, c'est l'équivalent de rentrer son adresse d'arrivée dans son GPS.
Et après ?








La génétique : les mutations, les biotechnologies, et l'eugénisme...

Supprimer les maladies génétiques graves, ou dériver vers l'eugénisme ?





Les connaissances en matière de génétique et de biotechnologies progressent très vite elles aussi. Si on peut détecter les éventuelles maladies génétiques d'un embryon, on peut aussi détecter d'autres traits génétiques, comme la couleur des yeux. Jusqu'où peut-on aller dans ce "nettoyage" génétique ? Tout sera bientôt permis par la technologie, donc la limite sera éthique.

Quand je vois que l'échographie sert à éliminer les filles dans certains pays, sans que ça indigne beaucoup les Occidentaux, et la montée des fascistes, je pense que les limites seront très vite atteintes et dépassées, et que l'éthique sera à géométrie variable...








Et maintenant, qu'est-ce qui nous attend ? 


"Nous sommes technologiquement triomphants, mais culturellement défaillants".
Edgar Morin, tweet, septembre 2016

"Nous ne sommes pas extérieurs à la nature, nous sommes la nature. Nos corps sont d'extraordinaires écosystèmes, inextricablement liés à l'ensemble du vivant."
Cyril Dion, Petit Manuel de résistance contemporaine, 2018


Nous sommes en plein Anthropocène, ou Capitalocène, période de l'industrialisation, de la mondialisation, de la consommation de masse, des produits synthétiques et de la pollution de masse. L'unique but est la croissance, d'où un déséquilibre dangereux.

Et si on tentait d'autres modèles, pour la société humaine dans le vivant ?




Cela me fait penser au travail mené par Dominique Méda, que j'ai pu écouter lors du festival des idées 2021 sur la question "Réparer le futur : on commence par où ?". Elle travaille sur le travail, l'économie, l'égalité femmes-hommes, le développement durable, les problématiques de croissance et ses enjeux sociétaux et environnementaux. Elle pose la question : d'autres modèles que la croissance économique et industrielle à tout prix sont-ils envisageables ? Et la question devient une sorte d'ultimatum pour l'ensemble des sociétés humaines : la croissance actuelle n'est pas tenable à moyen terme. Qu'on aime ce modèle ou pas, nous serons bientôt obligés d'en changer.

Croissance, décroissance, post-croissance ? Epanouissement ? Tout reste à construire. 


Une exposition un peu dispatchée sur différentes thématiques très éloignées l'une de l'autre, mais qui ouvre de vrais questionnements sur l'identité et le futur de l'humanité.


Création : 29/05/2022

Les récits futuristes peuvent-ils aider à développer l’esprit critique ?

L'exemple de l'exposition Renaissances : 
mercredi 29 septembre 2021
T'éduc, webinaire de la Cité des sciences





Construire un récit, se projeter dans le futur… Si ces exercices sont souvent employés en classe, ils semblent pourtant être rarement mis en lien avec le développement de l’esprit critique, thème très en vogue de nos jours. Il s’agit pourtant de se nourrir de connaissances et de projections pour visualiser l’avenir, et ainsi de confronter nos jugements et nos croyances à leurs potentiels impacts sur le monde qui nous entoure. 

Dans les musées ou dans les classes, comment les récits peuvent-ils aider à développer l’esprit critique des élèves ? Permettent-ils de développer les savoirs, et de les remettre en question ? 

Nous tenterons de répondre à ces questions, en nous appuyant sur les expériences des intervenants, ainsi qu’au travers les dispositifs muséographiques proposés sur l’exposition Renaissances. A travers des récits immersifs, cette exposition temporaire de la Cité des sciences et de l’industrie nous invite - à nous confronter aux risques socio-environnementaux de nos sociétés, et à penser la société de demain. 

Avec la participation de :

  • Côté recherche : Michel Fabre, Philosophe et professeur émérite en sciences de l’éducation à l’Université de Nantes, dont les travaux portent sur l’éducation dans la post-modernité et l’épistémologie des savoirs scolaires ; Yannick Rumpala, Maître de conférences, Laboratoire ERMES de l’Université de Côte d’Azur, étudiant notamment la science-fiction en sciences sociales et politiques;
  • Côté enseignement : Jean-Michel Zakhartchouk, enseignant ayant mené de nombreux projets d’écriture avec ses élèves ;
  • Côté institutions : Christelle Guiraud, commissaire de l’exposition Renaissances.


Un webinaire animé par Marie-Catherine Mérat, organisé en partenariat avec les Cahiers pédagogiques et avec le soutien de MAIF.


Notes au fil de l'eau :  

Demander aux élèves de se projeter dans le futur : la SF est un bon moyen de développer cet esprit critique.

C’est quoi la SF ?

C’est un contenu scientifique au sens très large. C’est une extrapolation sur des techniques et des sciences. C’est un décalage spatial et temporel. On se projette dans un univers qui n’est pas le nôtre. La frontière entre le présent et le futur est parfois floue.

C’est un genre narratif qui fait des hypothèses sur ce que pourrait être le futur, ce qu’aurait pu être le présent ou le passé, en s’appuyant (enfin pas toujours… on joue aussi sur des variables qui sont impossibles dans la réalité physique) sur les connaissances scientifiques, ethnologiques, sociétales actuelles.

William Gibson, Greg Egert font de la hard science, ils font un effort pour que leurs mondes créés suivent vraiment les lois de la physique.

La mauvaise réputation de la SF : clairement, c’est un genre « mineur » qui est méprisé, marginalisé. La SF qu’on veut vendre comme prestigieuse est présentée comme littérature blanche, comme Margaret Atwood. A l’Association française de sciences politiques, dans la section « politique et littérature » : le policier est cité, pas la SF.

Jean-Michel Zakhartchouk, enseignant ayant mené de nombreux projets d’écriture avec ses élèves (Fait partie des cahiers pédagogiques).

Par contre les jeunes apprécient particulièrement la SF. Mais ça reste marginal dans l’EN. Certains profs ont essayé d’introduire dans les programmes des réflexions sur le futur, ont essayé de relier la SF, l’esprit critique, le développement durable. C’est un travail fait avec Christian Grenier, auteur jeunesse SF. On peut croiser tout ça aussi avec l’uchronie. Il n’y a pas assez de documents de vulgarisation jeunesse sur le développement durable.

Par le biais de la narration et de la fiction, on réfléchit sur les problèmes de notre temps, ce qui est une des fonctions des récits futuristes. Comment faire pour éviter un futur trop sombre ? Ce n’est pas assez utilisé par les enseignants de français.

Maintenant qu’on a plein de documentation sur ces sujets, et plein de films et autres fictions, c’est plus facile d’écrire et de faire écrire de la SF.


C’est un genre d’initiés ? Est-ce que ça aiderait un enseignant de commencer par Jules Verne pour exercer son esprit critique ?


Michel Fabre : non, Jules Verne n’innove pas tellement. Il n’y a pas beaucoup de décalage spatial, temporel, technologique. Ses machines existent déjà, il perfectionne des machines qui existent déjà. C’est de la socio- et politique-fiction plutôt : c’est son intérêt. L’imagination d’un futur pas forcément riant. Il y a toujours un aspect ironique et critique dans ses œuvres concernant la science et la technique. Verne n’est pas un inconditionnel de la modernité, de l’industrie. Il en souligne les problèmes, comme la misère noire des employés de l’industrie. Il critique la pollution et l’inculture aussi.

Michel Fabre conseillerait le roman « Sans dessus dessous » de Verne pour commencer à étudier la SF en classe. C’est un roman du capitalocène : une critique de cette société du progrès qui veut tout exploiter dans son unique intérêt. Une critique de l’anthropocène, du capitalisme industriel et financier. Dans le roman, la moitié de la population finit noyée, l’autre asphyxiée. Une critique du pouvoir des multinationales qui échappent à tout contrôle étatique. Une critique du rôle de la presse, de la finance. On se rapproche du mythe de Faust, au prix de l’humanité.


La SF joue avec la plausibilité de scénarios imaginaires projetés.


2 dimensions importantes :
  • heuristique, exploratoire : un des intérêts de construire des mondes, c’est explorer des variables et des paramètres qui sortent de notre présent, de notre monde contemporain. On joue là-dessus. Qu’est-ce que serait une société qui aurait poussé X ou Y chose à son maximum ? C’est un laboratoire, une expériences de pensée, où on teste des hypothèses, de la même manière que la philosophie.
  • problématisation : esprit critique : on sort de l'évidence. Des choses qui nous paraissent évidentes, quand on est en décalage spatio-temporel, elles nous paraissent moins évidentes. Les aspects scientifiques, techniques, politiques, sociaux sont travaillés.

Par la lecture, quelques auteurs contemporains :

  • Dune
  • Le Meilleur des mondes (amélioration génétique)
  • Oblivion : c’est une allégorie, une métaphorisation du capitalisme extractiviste qui pompe les ressources de la planète, comme un vampire qui suce le sang de la terre jusqu'à la dernière goutte. En plus, il y a la surveillance par des drônes.


La SF a un côté un peu ardu, on parle beaucoup de sciences, techniques, technologies. Peut-être que c'est un aspect qui peut faire un peu peur. Donc un projet de récit futuriste avec des élèves, ce serait peut-être bien de le faire en transdisciplinarité.

C'est parfois difficile, mais la transdisciplinarité français-sciences est très intéressante. Mais la science de la SF correspond parfois à la vraie science, parfois c'est une science fantaisiste et c'est pas grave. Ce qui est intéressant pour l'esprit critique aussi, c'est d'arriver à faire comprendre aux élèves qu'il y a un côté fantaisiste dans la SF qui ne nous empêche pas de penser aux problèmes de notre temps. Ça rejoint les contes philosophiques. Micromégas, de Voltaire, c'est quasiment de la SF. Les Voyages de Gulliver aussi. En français, il y a le concept de « pacte de lecture » : on accepte, quand on est dans la science-fiction, qu'on puisse voyager dans le temps, aller plus vite que la vitesse de la lumière. Ces éléments impossibles n'empêchent pas de réfléchir à la critique de la société. Le côté scientifique est souvent un habillage, ça permet d'aborder des problèmes écologiques, économiques. Ce qui est intéressant aussi, c'est de voir le côté historique : dans La Mort de la Terre, Rosny parle de la pénurie d'eau. C'est important de croiser des auteurs anciens et récents. C'est une dimension forcément critique aussi. Et l'histoire de l'exploration du futur, c'est quelque chose qui hante les humains. Ce qui peut arriver, ce qui est aujourd'hui, est-ce qu'il y a des prémisses de ce qui peut arriver demain, plusieurs possibilités, optimistes ou non.


Cet exercice d'anticipation a été fait pour l'exposition Renaissances à la Cité des Sciences : élaborer les différents scénarios de l'exposition. Ce sont les imaginaires du futur dans le cadre des enjeux actuels, sociologiques, politiques, environnementaux ; une prise de conscience de plus en plus présente de ces enjeux. Les imaginaires des gens se développent de plus en plus, en écho.

On cherche à expliquer pourquoi on a ces imaginaires du futur, quels sont leur rôle dans la société.

On immerge les visiteurs au sein de fictions que les responsables de l'exposition ont écrites, et on leur propose une analyse critique (les aider pour ça) de ces fictions. C'est appuyé sur des imaginaires assez collectifs, quand même. Les visiteurs sont immergés dans ces fictions, avec les émotions qui vont avec, c'est très important. On veut provoquer des expériences de pensée, déclencher le questionnement, l'esprit critique et l'envie d'agir ; on veut que les visiteurs se souviennent aussi de cette expérience pour continuer la réflexion, l'analyse critique.

Proposer des expériences de pensée : on ne sait pas comment le futur va se passer, donc on peut imaginer des choses, pour ensuite en tirer des conséquences, se mettre à réfléchir, problématiser ce qui se passe aujourd'hui, mais dans le futur. Avec comme objectif de l'exposition : déclencher une envie d'agir. Il y a un décryptage scientifique, mais leurs scénarios sont pas trop sciences et techniques, plutôt sociologie, histoire, mythologie, économie, politique. Il y a forcément des dimensions techniques, mais les scénarios se concentrent sur autre chose. Toutes ces fictions sont plausibles parce qu'on veut que les visiteurs se posent des questions et se projettent dans ce futur.

Le visiteur joue (c'est un jeu virtuel) avec son téléphone sur les différents scénarios proposés, et ensuite seulement vient la phase analytique où on l'aide à penser son expérience de manière critique.

Le futur désirable est le plus difficile à imaginer. Il y a un certain nombre d'étapes psychologiques à passer avant d'être capable d'imaginer un futur désirable.

Il y a de l'anxiété chez certains enfants quand ils sont confrontés à des scénarios assez sombres. En SF, on a souvent des scénarios assez sombres. Comment on dépasse ça ?

Le philosophe Hans Jonasz (L'heuristique de la peur) (pas pour moi) dans l'exposition : la peur peut être un des leviers qui permet de se confronter à ce qui nous attend, et finalement d'agir pour dépasser cette peur, pour aboutir à du positif. L'éco-anxiété dans notre société est liée à la prise de conscience des changements actuels, notamment climatiques.

Le dernier scénario cherche à construire un monde souhaitable, positif, viable. La dystopie est plus facile à imaginer que l'utopie : c'est très humain, nos émotions sont toujours plus enclines à imaginer le pire. C'est démontré en psychologie. Il y a plusieurs étapes dans le cheminement de l'anxiété paralysante vers l'action positive. Dire aux visiteurs qu'on est tous capables d'agir, on est tous partie prenante, ce n'est pas une affaire d'experts ou de scientifiques. On peut travailler sur sa peur pour ensuite imaginer du positif.

Faire lire des dystopies à des enfants en littérature jeunesse, à un moment où leur esprit est en formation, ça peut être risqué par rapport à l'éco-anxiété. Le succès des dystopies, ce sont aussi des produits commerciaux, faits exprès pour faire vendre, pour faire peur, pour manipuler politiquement les ados. Que cherchent les producteurs de films ? A vendre ce qui se vend. Il y a un côté très manipulateur dans ce type de récit car ça fait fortement résonance au processus de construction intellectuelle et émotionnelle pendant la période adolescente. Dans tous les récits, il y a un accrochant politique. Dans ce type de récit, cet accrochant politique met en avant des formes d'héroïsation individuelle par rapport à des collectifs forcément méchants. Hunger Game, c'est clairement l'enfant en construction vers l'adolescence qui est en rébellion par rapport à l'autorité parentale. On produit un récit qui est très séduisant pour des gamins, en leur donnant une vision du monde qui est quand même assez particulière.

Il n'y a pas beaucoup de récits futuristes positifs et utopiques ; pour des raisons qui s'expliquent : faire un bon récit captivant, c'est plus facile quand quelque chose va mal. Quand tout va bien, faire un récit captivant, c'est plus compliqué, pour des raisons bassement narratives. Pour captiver un lecteur / un spectateur, c'est plus facile de jouer sur le ressort narratif quand les événements vont mal.


Demander aux élèves d'inventer et d'écrire ces récits futuristes positifs ? Mettre en place un laboratoire d'idées ?

Épistémologie de la problématisation : Michel Fabre. Est-ce que la SF est un bon moyen de travailler des problèmes complexes ? Aujourd'hui on a énormément de controverses scientifiques, avec beaucoup de facteurs. Est-ce que les élèves arrivent à s'y retrouver ? Est-ce que les faire travailler sur des récits futuristes, ça peut être un bon moyen de les faire travailler sur cette complexité ?

Michel Fabre : il y a l’idée de la critique. On a beaucoup insisté sur l'idée que c'est le lecteur / spectateur qui va faire la critique et que l’œuvre en elle-même n'est pas critique. En fait il y a aussi des œuvres qui incorporent cette critique. Par exemple chez Jules Verne où on a le procédé de l'ironie, du contraste utopie / dystopie.

La problématisation est donc possible avec la SF : l'imagination d'un autre monde relativise le sien propre et fait apercevoir des choses qu'on ne voyait pas. Les données et les paramètres avec lesquels on joue relativisent notre univers. On se rend compte que l'univers dans lequel on vit n'est que l'un des univers possibles dans la réalité. On nous présente notre monde comme nécessaire, le seul possible, mais en inventant d'autres possibles, on peut réfléchir, ouvrir sa réflexion, ouvrir un espace de liberté. Donc oui, c'est ça la problématisation.

Les émotions et les risques psychologiques de ces émotions : il ne faut pas négliger de jouer à la fois, la dialectique entre l'appropriation (« vivre l'histoire ») et la distanciation. C'est ça qui permet de sortir, de prendre les choses avec du recul. A la fois prendre conscience des catastrophes, mais aussi comprendre pourquoi ces catastrophes arrivent ou peuvent arriver. La distanciation est donc aussi importante. Tout ça fait partie de la problématisation : il faut être à la fois impliqué, et à la fois prendre des distances.

Développer l'esprit critique en fonction de leur réalité vivante est important.

Pour les sciences dures, il y a une autre manière de faire de l'esprit critique. Ça dépend de ce qu'on appelle critique. On peut inviter les élèves à questionner les superbes inventions qu'on voit dans les films. Par exemple, des choses développées par Roland Lehoucq qui s'amuse à tester la plausibilité d'un certain nombre de représentations qu'on voit en SF. Un sabre laser ? Un vaisseau spatial ou un monstre de telle dimension ? C'est possible ? Cela fait intervenir les sciences physiques, la biologie.

C'est peut-être un peu difficile pour des élèves de collège. Mais ça peut être une bonne manière de donner un contenu concret à quelque chose qui peut leur paraître abstrait. Les maths servent à faire décoller les fusées : c'est un exemple concret qu'on peut donner aux élèves pour les intéresser aux choses scientifiques abstraites.

La SF peut être le moyen de faire le chemin inverse : partir des fabuleuses inventions qui existent dans la fiction, et amener les élèves à se questionner sur leur degré de crédibilité.

Ça peut être vrai aussi pour d'autres types de sciences comme l'économie ou les sciences sociales : dans quelle mesure une société qui fonctionnerait sur certaines bases anthropologiques pourrait tenir sur la longue durée par rapport aux hypothèses qui ont été posées. En histoire aussi, avec l'histoire contre-factuelle, l'uchronie, les variables historiques (on peut constater que parfois ça s'est joué à pas grand-chose, c’était plus du hasard).

La fiction finalement est une amie de la raison. Elle permet de faire preuve d'imaginaire et de faire le tri entre l'imaginaire et la réalité. Les théories du complot : en SF, c'est très riche. La fiction n'est pas du côté de l'irrationnel, le travail interdisciplinaire permettrait de faire le tri entre l'imaginaire et le scientifique.

Partir d'idées de SF et les décortiquer, ça semble plus simple que d'écrire une nouvelle d'anticipation.


Des courants artistiques : 
  • Cyberpunk : Début 1980, prend le contre-pied de la SF de l'époque qui est portée vers le progrès, l'exploration spatiale. Un courant d'auteurs décide de faire revenir la SF sur Terre, avec comme hypothèse de mélanger le high-tech (cyber) avec une forme de déliquescence sociale généralisée (punk). Ce sont les années où on commence à découvrir les potentialités de l'informatique.
  • Steampunk : uchronie : qu'est-ce qui se serait passé si la technologie dominante aujourd'hui était restée la machine à vapeur et le charbon, au lieu d'être passée au pétrole ? Quel fonctionnement social ? Steam = vapeur en anglais.
  • Biopunk : on se concentre sur les bio-technologies, la manipulation du génome, etc
  • Solarpunk : comme base sociale, les énergies renouvelables (soleil), et toutes les valeurs culturelles qui peuvent y être associées : ouverture sociale sur les différences de genre, de culture. Une société pacifique envers les différences, douce, respectueuse. C'est plus un manifeste qu'un vrai courant littéraire, peu d’œuvres là-dessus. Mais Ursula Le Guin peut y être rattachée.


Sitographie :

https://www.cite-sciences.fr/fr/vous-etes/enseignants/formations-et-projets/teduc/

http://www.lecturejeunesse.org/numook/

https://fr.wikipedia.org/wiki/Lionel_Naccache

https://www.cea.fr/comprendre/jeunes/Pages/multimedia-editions/podcasts/physique-des-super-heros.aspx (Roland Lehoucq ?)




Création : 29/09/2021

L'exposition du siècle !

La BnF nous propose une exposition monstre sur Tolkien et son oeuvre : "Tolkien, voyage en Terre du Milieu". A ne pas rater !










[Je sais que c'était interdit de prendre des photos].

On est tout de suite accueillis par de grands panneaux imprimés qui nous plongent sans crier gare dans l'univers littéraire et artistique de Tolkien : ses créations, son imagination, ses recherches ; et l'univers visuel issu des films de Peter Jackson.

L'entrée de l'exposition




On se sent tout petits du fait de cette scénographie, et on découvre l'envers du décor : la genèse, les richesses, les significations de l'incroyablement vaste création de ce génie...

Cartes et chronologies


D'abord quelques repères chronologiques et géographiques : Tolkien a créé son monde avant de créer ses personnages ; il avait l'histoire et la géographie globales ET précises en tête avant de commencer. Et d'après lui, on devrait toujours commencer une histoire ainsi : « J'ai commencé, avec sagesse, par une carte, à laquelle j'ai subordonné l'histoire. […] Faire l'inverse est source de confusion et de contradictions. »



1e carte du Seigneur des Anneaux 1937-1949
Carte de la Terre du Milieu annotée par Tolkien
"La Terre du Milieu, située entre les océans, ressemble à notre Europe, transposée dans un passé imaginaire. Dessinée par Christopher Tolkien, ancien pilote de la Royal Air Force possédant une excellente connaissance de la cartographie, et annotée par Tolkien pour qui Hobbitville serait située à la latitude d'Oxford."

 

D'autres cartes, plans, chronologies :

  

Les Hobbits et la Comté


« J'ai commencé, avec sagesse, par une carte, à laquelle j'ai subordonné l'histoire. […] Faire l'inverse est source de confusion et de contradictions. »

Il n'a peut-être pas tort, mais quand même, se laisser porter par une histoire et des personnages avant de se préoccuper de cartes et de chronologies, c'est agréable aussi...

1e carte du Comté

 

On y retrouve un peu le type d'iconographie de la Montagne Solitaire



Les Nains et la Moria


Le Livre de Mazarbul : si Le Seigneur des Anneaux ressemble à un roman historique, il le doit aussi à la présence de "documents" cités au fil du récit ou reproduits, comme les mots sur la tombe de Balin et la porte de la Moria. Tolkien espérait insérer trois pages de fac-similés de manuscrits "nains" qu'il avait réalisés.



Les Portes de la Moria, ou Portes de Durin 

Sur la porte de la Moria, des symboles renvoient au peuple des Nains (l'enclume, la couronne, les étoiles), d'autres (les arbres) aux Elfes. La juxtaposition des lettres elfiques sur l'arche et de leur translittération en caractères latins, sur le dessin, fonctionne comme la pierre de Rosette.
Le Seigneur des Anneaux contient une représentation graphique de la porte que les héros trouvent sur leur chemin, lorsqu'ils essaient d'entrer dans la Moria, un royaume des Nains. Le mage Gandalf fait apparaître le dessin d'une porte et des lettres qu'il s'agit pour lui d'interpréter correctement, pour ouvrir le passage.

Je trouve toutes ces idées fascinantes. Différents symboles, différentes langues, des juxtapositions, des translittérations, une interprétation linguistique pour ouvrir un passage... Ou comment rendre la linguistique fascinante et support d'éléments fictionnels et narratifs. Manipuler la langue permet d'avancer dans le récit, d'abolir des obstacles, de résoudre des énigmes. C'est l'énigme du Sphinx, c'est l'Histoire sans fin. C'est extraordinaire.

   
  


La Moria et les Prisons imaginaires de Pinarèse

« Gouffre noir » en Sindarin (elfique), la Moria se caractérise par la grandeur de son architecture massive, laissant pourtant un sentiment de confinement. Ce monde sombre et souterrain évoque Pinarèse et sa série des Prisons imaginaires (1745-1750). Ce sont là aussi des lieux imaginaires, un univers ténébreux, aux nombreux niveaux et aux machines étranges.

Et ces gravures de Pinarèse sont magnifiques. Je suis restée longtemps à les contempler.




Les Elfes, la Lothlorien, Rivendell


Ah, les Elfes et la Lothlorien. Que de merveilles... C'est l'élégance incarnée.

Rivendell :



 

La forêt de Lothlorien au printemps


La porte du domaine du roi des Elfes

 

Les langues


D'innombrables langues ont été inventées par Tolkien, avec leur histoire, leur évolution, leur grammaire, leur phonologie... Un travail totalement incroyable, même venant d'un brillant linguiste universitaire. Imaginons que tous les linguistes fassent de même : que de créations géniales aurait-on.

Et les panneaux de l'exposition les mettaient bien en valeur, lumineuses sur fond bleu sombre.



 

 


 

Grammaire, flexion, arbre des langues, systèmes consonantiques, phonologie... Tout y est. On sent que Tolkien s'est bien amusé ! Il était dans son élément.

  


L'arbre des langues : Partant de la langue des Valar, cet arbre montre l'apparition de celles des Elfes (Quendil), des Nains, des Orques, mentionnant le qenya ("latin des Elfes") et le noldorin, selon la conception qu'avait alors Tolkien de leur histoire fictive : six de ces langues "sont encore parlées", quatre "sont encore préservées ou conservées dans des écrits".

Et on peut même écouter de l'elfique !!


La forêt


Un arbre anthropomorphique :

 

Vieil Homme-Saule :


Les forêts : refuge ou danger ?

Les deux : chez Tolkien, rien n'est univoque ni simpliste. Son oeuvre est un hymne à la puissance de la nature sauvage, préservée des atteintes de la révolution industrielle, dont les représentants sont les Ents : "les Ents sont composés de philologie, de littérature et de vie. Ils doivent leur nom aux géants anglo-saxons, et à leur rapport à la pierre. Je mourrais d'envie de concevoir un cadre dans lesquels les arbres pourraient réellement partir en guerre."

Saroumane et Isengard


Orthanc, tour de Saroumane, au centre d'Isengard :

 

Les influences iconographiques : Doré, Rackham, Dulac


Toutes ces sources iconographiques m'ont également beaucoup inspirée. Je suis d'accord avec Tolkien : la littérature, les images, l'imagination sont liées, inextricablement. Elles se nourrissent les unes les autres, et c'est une des manières de créer des chefs-d'oeuvre. 
Et je constate que j'ai des points communs avec Tolkien pour ce qui est du type d'images qui nous inspirent.

Doré : il reste mon artiste préféré dans le domaine de la gravure.

Le Petit Poucet de Charles Perrault
Dans le Petit Poucet, la forêt est un lieu terrible et sombre. C'est l'endroit où l'on perd les enfants. Mais dans le Petit Poucet, c'est l'enfant le plus petit, et a priori le plus faible, qui sauve tous les autres. Le rôle joué par les Hobbits est du même ordre dans le Seigneur des Anneaux : c'est ce que Tolkien appelle l'ennoblissement.

 


L'Enfer de Dante
"Alors il se mit en marche, et je le suivis", Ch. I
Virgile et Dante se rencontrent dans la forêt et entament leur voyage vers l'Enfer. Les personnages apparaissent dans un univers à la fois minéral et végétal qui écrase par sa taille et sa force.



"J'entendis ce qu'on me disait : Prends garde où tu marches !"
Comme Virgile conduit Dante dans l'illustration de Doré, Gollum conduit Frodo et Sam à travers les Marais Morts. Dans la pénombre qui s'épaissit, à l'approche du Mordor, la silhouette des joncs et roseaux mourants évoque "les ombres haillonneuses d'été depuis longtemps oubliés".



Comment ne pas être fasciné ? Effrayé ? L'effroi qui immobilise, qui paralyse, qui empêche la pensée de réagir - et en même temps, souhaitons-nous être ailleurs ?


Une source d'inspiration pour le Balrog, dans l'Enfer de Dante :
L'Enfer : sur ce dessin accompagnant le texte de l'Enfer de Dante apparaît une figure de démon. On distingue des ailes, des cornes, vaguement une face. Il s'agit d'une créature dévorante. L'image correspond assez bien à ce que Tolkien dit des Balrog - "esprits premiers du feu destructeur".




Une créature des eaux, digne inspiratrice des monstres des marais du Mordor : Nokken ou le Nokk, Théodore Kittelsen, 1916 :



C'est terrible, effrayant et magnifique. Deux yeux seuls, une face vaguement humaine, un monstre qui se devine, un fantôme ? Une créature inhumaine ? L'effroi est là, il ne pourra que nous saisir, empirer.


Roland Furieux de l'Arioste




Idylls of the King (Enide), de Tennyson

 

Les idylles : Idylls of the King, publié entre 1859 et 1885, est un cycle de douze poèmes narratifs du poète anglais Alfred, Lord Tennyson (1809–1892) qui raconte la légende du roi Arthur :

1 La venue d'Arthur
2 Gareth et Lynette
3 Enid (Camelot ; Yniol Shows Prince Geraint His Ruined Castle)
4 Balin et Balan
5 Merlin et Vivien
6 Lancelot et Elaine
7 Le Saint Graal
8 Pelleas et Ettare
9 Le dernier tournoi
10 Guenièvre
11 Le décès d'Arthur
12 À la reine


Histoire des croisades :
"Plus de cent mille tête furent lancées dans Nicée..."


Rackham

Le Vaillant Petit Tailleur (1909)


Le songe d'une nuit d'été (1909)



Dulac

L'Eldorado de Poe



L'Apocalypse de Jean

 


La Tentation de Saint-Antoine, Callot (1592-1635)


Le désordre, la quasi toute-puissance du Mal : "Dans mon histoire, Sauron  représente ce qui s'approche aussi près que possible de la volonté totalement malfaisante. [...] Il est allé plus loin que les tyrans humains dans son orgueil et son désir de domination" Tolkien.

Les influences littéraires et historiques : bibliophilie, philologie


Ce sont des sources essentielles pour Tolkien ; mais je dois dire que cela me fascine moins. Ou du moins cela stimule moins ma fibre créatrice. Trop historique, trop sérieux, trop réel. Pas assez d'imaginaire là-dedans.

Chronologie du Danemark (1643) par Ole Worm :


Monuments danois, Ole Worm (1642-1643)


Ce document est un relevé des inscriptions runiques des pierres dressées en Scandinavie. Les runes peuvent s'écrire à l'horizontale comme à la verticale.


A l'Est du Soleil et à l'Ouest de la Lune - contes anciens du Nord (Edmond Pilon et Kay Nielsen, 1919)
Franchement, un titre pareil, c'est complètement irrésistible !




Saint-Georges combattant le dragon (1350)
De nombreux saints sauroctones, qui combattent des dragons ou des monstres.



Histoire de Merlin, Robert de Borron, XVe

 

Lancelot du Lac (XVe)

 

La Chanson des Nibelungen, Franz Keim et Carl Otto Czeschka, 1908



D'autres livres absolument magnifiques :

  

Coups de cœur pour...


... Taur-na-Fulin (Silmarillion). Il faut dire, le tableau et la mise en scène sont grandioses, avec le miroir immense :



C'est totalement magnifique.
Beleg découvre Flinding à Taur-na-Fulin (Silmarillion) : elle préfigure La Forêt de Grand'Peur. L'archer Beleg, part à la recherche de son ami Turin, découvre l'Elfe Flinding (Gwindor), évadé des mines de Melkor-Morgoth, le maître de Sauron.

   


... Le Pays des contes, une vaste carte où sont répertoriés tous les lieux et toutes les histoires imaginaires. Un petit bijou !



... L'épée scandinave du IXe siècle (comme dans Beowulf !) et le majestueux jeu d'échecs de Charlemagne du XIe siècle, en ivoire.

 


... la salle de l'Anneau, au décor grandiose

 


... le décor qui ressemble à la bibliothèque universitaire que fréquentait Tolkien (du moins j'imagine)

 

Le calendrier runique, sur une épée 



La religion - les Valar


Le Silmarillion contient un récit de cosmogonie original et marquant : dans l'Ainulindae, les Ainur (puissances créatrices) participent à la création du monde en musique, sous la direction du Créateur, Eru Eluvatar, nom elfique qui signifie "l'Unique, Père de Tout". Dès ce début, la volonté affichée par le Vala Melkor de jouer une autre partition, de créer sans se soucier de la communauté, annonce sa rébellion et montre que la relation entre le collectif et l'individuel constitue l'un des fils de la grande Histoire inventée par Tolkien, longue de milliers d'années.

Sinon, il est beaucoup question des Valar (dieux) dans l'exposition, notamment de Manwë (Taniqueti) : Halls de Manwë (Taniquetil), le plus puissant des Valar - du haut des montagnes :

 


Documents préparatoires de Tolkien


Ruines de Whitby Abbey, Yorkshire, dessinées par Tolkien : il a un sacré talent !


Une maison nordique


Le val du Sirion

 

D'autres

   

Conclusion


Tolkien s'est attelé à l'élaboration d'une oeuvre colossale formant un tout cohérent qu'il a appelé son Légendaire. Son goût pour les langues demeure l'origine de sa vocation d'écrivain : "Les langues et les noms ne peuvent être selon moi séparés des histoires. C'est pour ainsi dire, une tentative pour fournir un arrière-plan ou un monde dans lequel l'expression de mes goûts linguistiques pourrait avoir une fonction."

Depuis Le Livre d'Ishness, les cahiers émouvants du Livre des contes perdus (première guerre mondiale), l'oeuvre se poursuit jusqu'aux récits inachevés au moment de sa mort. Le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux ne forment qu'une petite partie de l'histoire de la Terre du Milieu et sont compris dans une "mythologie" bien plus vaste dont tous les aspects (cosmogonie, géographie, histoire, linguistique, botanique, paléographie) ont été inventés par Tolkien jusqu'à les rendre vraisemblables.

"A la fin de la quête, la victoire ?"

Le Seigneur des Anneaux propose une anti-quête puisqu'il s'agit, pour la Fraternité, non de trouver l'Anneau, mais de se rendre au Mordor, lieu de sa création, pour le détruire, en résistant à son fatal pouvoir de séduction au fil d'un voyage de plusieurs mois à travers la Terre du Milieu. Tolkien réinvente et subvertit l'héritage médiéval du héros, de l'aventure et de la quête (le Graal).

Le fils à l'oeuvre


Sans Christopher Tolkien, son troisième enfant né en 1924, que connaîtrait-on de l'oeuvre de JRR Tolkien ? Premier auditeur du Hobbit puis relecteur des épreuves ; tour à tour copiste et cartographe pour Le Seigneur des Anneaux, un récit très largement écrit pour lui, et qu'il a aidé à voir le jour, Christopher est devenu l'exécuteur littéraire de son père - disparu en 1973.

A son tour membre des Inklings, maître de conférences à l'université d'Oxford, spécialiste de littérature médiévale (en particulier des sagas nordiques et de Chaucer), il quitte l'enseignement à 50 ans pour se consacrer à l'édition des milliers de pages manuscrites, rédigées durant 6 décennies par son père. Nombre d'entre elles sont surchargées de strates de textes de couleurs différentes : les classer, les déchiffrer, lui a demandé plus de 45 années, consacrées à faire paraître d'abord Le Silmarillion (1977) puis une douzaine de volumes présentant les œuvres achevées ou non, qu'ils a commentées en retraçant l'évolution de L'Histoire de la Terre du Milieu ; aux côtés de volumes d'essais (Les Monstres et les critiques), de traductions (Beowulf, Sire Gauvain) et de "contes" que sont Les Enfants de Hurin, Beren et Luthien, jusqu'à La Chute de Gondolin en 2018. Sans ce guide, philologue lui aussi, l'oeuvre de son père nous serait restée largement inconnue, comme un véritable labyrinthe de papier, ou une forêt inexplorée.

Tolkien à la librairie


Et pour prolonger le plaisir de cette belle et riche exposition, petit tour par la librairie :

  

 

Catalogue :


 

 

Cycle "La Fantasy à l'honneur"


Cette exposition s'est inscrite dans le cycle "La Fantasy à l'honneur" organisé par la BnF, qui compte de riches programmes :

- une soirée d'ouverture, réservée aux happy few dont j'ai eu l'honneur de faire partie grâce à Jérôme Vincent d'ActuSF
- "Construire des mondes - World building", conférence d'Erwan Le Breton et de Laurent Di Filippo
"Anthologie d'un genre littéraire", conférence d'Anne Besson sur la Fantasy






Et d'autres, comme :
(on peut les réécouter via des podcasts)

Impressionnant !



Création : 04/02/20